
Jean-Michel Rogez est né le 6 avril 1946, à Hénin-Liétard dans le Pas de Calais. Il est issu
d’une famille de mineurs. Il sera le premier d’entre eux à obtenir son baccalauréat. Il débute ses
études de Médecine à Lille et sera nommé Interne des Hôpitaux de Nantes en 1969. Il se destine
initialement à l’Oto-Rhino-Laryngologie, mais sa rencontre avec Jean-Vincent Bainvel, le fait opter
pour la chirurgie orthopédique. Il réalise son service militaire au Malawi, de décembre 1970 à
mars 1972. Il y découvre la chirurgie en situation précaire et le rugby. Il ramènera de cette
expérience de solides convictions et de nombreuses histoires qu’il partagea largement avec ses
élèves. En orthopédie, il est entouré par Joseph Letenneur et Norbert Passuti. Il partagera avec
l’un sa passion de la chirurgie de la hanche et l’autre son intérêt pour la chirurgie de la colonne
vertébrale.
Son activité dans le service d’Orthopédie de l’Hôpital Saint Jacques s’orientera
progressivement vers l’orthopédie pédiatrique. Il se formera auprès des Maîtres de l’Orthopédie
pédiatrique française (Pierre Rigault, Henri Bensahel, Henri Carlioz, Bernard Glorion, Jean-Gabriel
Pous) mais aussi à l’étranger, ou il visitera Sharrard, Lloyd Roberts et Freeman en Angleterre,
Hyatt aux Etats-Unis, et Salter en 1976 à Toronto (il assistera à la victoire olympique de Guy Drut
à Montréal, cet été là). Il participe avec les jeunes orthopédistes pédiatres de sa génération
(Gérard Bollini, Jean-Philippe Cahuzac, Rémi Kohler, Pierre Lascombes, Dominique Moulies) au
BIBLIOP à des séances de bibliographie en Orthopédie Pédiatrique riches en échanges et en
amitié. Il crée avec ses collègues orthopédistes pédiatres Henri Bracq, Jean-François Mallet,
Frédéric Laumonier, Christian Bonnard et Joël Lechevallier, le GOPO, qui sera l’occasion
d’engueulades homériques (en raison de la très forte personnalité de la plupart des ses membres)
qui sur régleront toujours autour d’une bonne table.
A Nantes, il côtoie également le Professeur Jean-Yves Barbin, directeur du Laboratoire
d’Anatomie. Cette rencontre sera déterminante pour sa carrière. Il est nommé Assistant
Universitaire d’Anatomie le 1er avril 1975 puis Chef de Travaux en janvier 1979. Il animera l’équipe
avec Joël Le Borgne, Michel Pannier et Roger Robert, puis Philippe Patra, Paul-Antoine Lehur et
Yves Héloury. Olivier Hamel, Stéphane Ploteau, Céline Salaud-Fournier et Cyrille Decante
bénéficieront tous de ses enseignements et de ses conseils. Il se prépare à l’agrégation auprès du
Professeur Maurice Laude à Amiens. Cette “campagne de la Somme“ sera l’occasion de tisser
des liens indéfectibles d’amitiés avec de nombreux anatomistes français et étrangers, Denis
Valleix, Serge Nazarian, Pascal Foulon, Christian Brunet.
En 1988, il est nommé Professeur des Universités en Anatomie et devient le chef du
service de chirurgie infantile qu’il vient de créer avec Yves Héloury, Jean-Claude Le Néel et Michel
Pannier, et qui regroupera rapidement toutes les activités de chirurgie viscérale, urologique,
thoracique, plastique et orthopédique du Centre Hospitalier Universitaire de Nantes. Cette équipe
complétée par Sophie Guillard, orthopédiste, Jean-Claude Levilain, pédiatre et Ginette Biton,
secrétaire permettra d’assurer le développement de la chirurgie pédiatrique à Nantes.
Il s’implique dans la faculté dont il sera membre du conseil de Gestion pendant plus de
trente ans. Il sera Vice-Doyen de Jean-Yves Grolleau. Il est enfin élu Doyen de la Faculté de
Médecine en 2005, secondé par Madame le Professeur Jolliet pendant ses deux mandats.
Bernard Planchon et Pierre Pottier seront ses fidèles vice-Doyens à la pédagogie. Il sera à
l’initiative, comme président du conseil scientifique de médecine, de la mise en place de l’Examen
National Classant Informatisé. Il sera très fier d’appartenir, à la suite de ses Maîtres Laude,
Gouazé et Caix, au groupe des Doyens Anatomistes avec Jean-Paul Francke, Jacques Rolland,
Daniel Le Gars, Denis Valleix, Jean Chazal ; Marc Braun, Patrick Baqué, Olivier Palombi, Eric
Havet suivront. Il occupera les plus prestigieuses fonctions de ses deux disciplines universitaires :
il présidera le Groupe d’Etude en Orthopédie Pédiatrique, la Société Française de Chirurgie
Pédiatrique, la sous-section 42-01 du Conseil National des Universités (Anatomie) et la section 42
(Sciences Morphologiques). Il succédera à Maurice Laude au secrétariat général du Collège
Médical Français des Professeurs d’Anatomie.
Jean-Michel Rogez était un homme entier, doué d’une volonté inextinguible. C’était un
affectif, dont les colères pouvaient être aussi légendaires qu’immédiatement oubliées. Il a été un
chef de service aimé par tous ceux qui ont travaillé à ses côtés. Il n’était pas rare, qu’une
infirmière ou qu’une auxiliaire puéricultrice qui traversait des difficultés personnelles frappe à la
porte de son bureau à 6h du matin à la recherche d’une oreille attentive qu’elle trouvait toujours. Il
était également dévoué à ses jeunes patients et à leurs parents qu’il visitait tous les jours. Pour
ses élèves, il était un guide ferme et bienveillant, un Maître qui oeuvre à leur réussite. Il avait à la
fois le sens de la formule et de la synthèse (“continuer à travailler“ sera l’intégralité de son projet
de renouvellement de chefferie de service). Il était un chirurgien brillant (“car je connais
l’Anatomie“) et dont la main ne tremblait pas (“la chirurgie ce n’est pas pour les timides !“). Il avait
une force de travail considérable. Il était un véritable capitaine d’équipe qui souhaitait que tous
ceux qu’il dirigeait travaillent ensemble malgré leurs différences (comme dans une équipe de
rugby). Il marqua des générations d’anatomistes et de chirurgiens orthopédistes d’adultes et
d’enfants. C’était un Patron exceptionnel.